La crise sanitaire et économique liée au coronavirus va bientôt fêter son premier anniversaire. Le temps est venu de dresser un premier bilan et surtout de prendre à l’échelle du monde de l’entreprise les premières leçons de cet événement inédit dans notre histoire contemporaine.
Un soutien réel de la part de l’État
Assez vite après le début du premier confinement, la crise sanitaire a touché de plein fouet les TPE et PME françaises, dans certains secteurs d’activité plus que dans d’autres toutefois. En effet, si le secteur agricole, l’industrie, les secteurs pharmaceutiques, la chimie, et l’agroalimentaire ont peu à peu retrouvé des activités proches de l’avant-crise, les secteurs des transports, de l’automobile, la métallurgie sont toujours en difficulté.
Il y a pire : pour les services marchands, la restauration, l’hébergement, les secteurs de la culture et de l’événementiel, l’activité est encore très faible, voire à l’arrêt. À l’opposé, les secteurs de l’information et de la communication sont en croissance.
Pourtant, paradoxalement, les soutiens aux entreprises mis en place par l’État ont permis la diminution des faillites de 29% pour les PME par rapport à 2019. Les aides publiques (chômage partiel, fonds de solidarité, Prêt Garanti par l’État) et les premiers effets du Plan de relance ont donc fortement absorbé l’impact de la crise sur les entreprises correctement accompagnées et informées par leur cabinet comptable ou juridique.
La communication interne, un enjeu crucial
Pour la plupart des chefs d’entreprise, la principale difficulté était donc ailleurs. Et souvent, il s’agissait de trouver les réponses attendues, parfois avec anxiété, par leurs salariés : leur emploi était-il menacé ? Les conditions de travail permettaient-elles sa poursuite en toute sécurité ?
En entreprise, le silence est souvent synonyme de menace latente. Exposé au même titre que ses salariés à la menace de la Covid-19, le chef d’entreprise devait donc à la fois rassurer ses salariés et assurer la pérennité de leur emploi en sauvant l’activité.
Pour ce faire, il lui fallait mettre en place une veille d’information auprès des médias, des réseaux, des autres professionnels, puis recouper ces informations et les sélectionner, et enfin les diffuser.
À l’échelle d’un groupe comme celui que j’ai l’honneur de diriger, cette tâche a été menée par l’ensemble du comité de direction qui s’est mobilisé en réunion toutes les semaines (au lieu de tous les mois). Chacune de ces réunions a permis la rédaction puis l’envoi d’une synthèse à tous les salariés du groupe à propos de l’actualité de l’entreprise, son activité, l’état de santé de ses dirigeants et de ses salariés, agrémentée de quelques mots tendant à montrer une proximité bienveillante ou à faire sourire pour apporter de la relativité face à la situation.
Cette communication interne directe a eu pour effet de rassurer les salariés sur le maintien de leur emploi comme de leur poste de travail, mais aussi de souder les équipes autour d’un objectif commun, celui de préserver l’activité.
Le numérique, pilier de l’entreprise désormais
Avec les confinements successifs, la pérennisation de l’activité par le télétravail a parfois pu être un problème, et l’enjeu du numérique est vite venu au premier plan.
Même sans parler des difficultés de réseaux propres aux territoires et aux zones blanches qui entachent l’activité dans certaines zones rurales, pour certaines entreprises sommées de mettre en place rapidement le télétravail, les choses devenaient vite difficiles si la transformation digitale n’avait pas été envisagée en amont.
C’est en effet sur des outils tels que les réseaux partagés, l’accès à la fibre ou encore la sécurisation des données que reposait le succès de la transition vers le télétravail. Sans une anticipation proactive dans ces domaines, il devenait compliqué de gérer leur mise en place conjointement à celle du télétravail.
L’économie circulaire pragmatique, un objectif à poursuivre ensemble
Mais la leçon la plus évidente de cette année de crise est liée à la relocalisation de nos moyens de production. Si le grand public a pris progressivement conscience au fil des semaines de l’importance des producteurs maraîchers locaux, les entreprises ont elles été confrontées au manque cruel et dommageable des fournisseurs locaux.
En effet, une fois les frontières fermées et les avions au sol, combien de chantiers ont été bloqués par le manque d’une pièce détachée, par l’indisponibilité d’un matériel ou d’un service ! Cette dépendance toxique et cette incapacité à l’indépendance via le maillage territorial ont créé des situations frustrantes et parfois désastreuses économiquement parlant.
Dans le même temps, l’entraide et la solidarité jouaient à plein, de nombreuses entreprises ont ainsi été dépannées par d’autres entreprises locales capables de fournir masques et gel hydroalcoolique par exemple.
Si l’économie circulaire de crise est possible, elle doit l’être aussi hors période de crise : c’est à nous de la construire sur les fondations de ces constats solennels qui engagent non seulement la viabilité de nos entreprises, mais au-delà, l’indépendance économique de nos régions, voire de la France.
Alors, comment faire ? Pour parvenir à un maillage vertueux des territoires, les donneurs d’ordre (grands groupes, ETI) doivent travailler main dans la main avec les TPE et les PME, déjà pour identifier les enjeux prioritaires dans le cadre de plans de continuité d’activité, par exemple. Le particulier doit aussi prendre conscience, dans sa vie de tous les jours, que l’achat local à un fournisseur lui-même vertueux est un acte salvateur qui dépasse son simple achat.
Il deviendra alors possible de chercher ensemble un équilibre qui permette d’un côté aux donneurs d’ordre d’agir sur la dynamique des territoires qu’ils occupent, et en cela de garantir le bien-être de leurs salariés et le tissu de sous-traitance – donc la continuité de leur activité – en cas de nouvelle crise, et d’un autre côté aux TPE / PME de préserver leurs propres activités tout en rassurant les salariés.
Toute crise est un miroir dont le reflet peut faire peur, un temps, mais dont le vrai rôle est de nous inciter à l’action. La crise du coronavirus a dévoilé notre vulnérabilité et notre dépendance économique et industrielle. C’est maintenant qu’il nous faut agir pour y remédier, à l’échelle des territoires comme de la France.