C’est un fait, le métier de Chief Happiness Officer bénéficie en ce moment d’un alignement des planètes médiatiques favorable. Mais passé l’effet de mode quelle leçon tirer pour l’entreprise de cet engouement qui touche les dirigeants comme des employés ?
Chade-Meng Tan, un pionnier médiatique
Si les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ont révolutionné la planète par leurs innovations numériques, on leur doit également quelques découvertes en terme de management : c’est en effet chez Google qu’est né le concept de Chief Happiness Officer – traduisez « Directeur du Bonheur ».
Le pionner concerné se nomme Chade-Meng Tan, ingénieur de son état, qui rejoint Google en 1999 en prenant des parts dans la start-up. Quelques années plus tard, la société grandissant, il devient millionnaire. Mais plutôt que de courir après les promotions il décide de consacrer les 20% de son temps dévolu à ses projets personnels (autre innovation de Google) à la neuroplasticité (la réactivité du cerveau aux stimulations) et à l’intelligence émotionnelle.
Il rédigera suite à ces travaux une synthèse regroupant les quelques principes qui permettent de se sentir mieux et d’être plus performant dans sa vie tant professionnelle que personnelle. Le concept du CHO était né, porté ensuite par la médiatisation de son auteur.
Qu’est-ce que le CHO (Chief Happiness Officer) ?
Il a ainsi fallu passer par l’exemple d’une société illustre pour revenir à ce constat simple et de bon sens : une entreprise qui considère ses salariés et leur prouve son engagement à leurs côtés se portera mieux que si elle ignore leurs besoins personnels et professionnels.
Le CHO est donc, dans l’entreprise, chargé de cette double tâche : être à l’écoute des salariés et trouver des actions concrètes à mettre en œuvre pour améliorer leurs conditions de travail ainsi que leur état d’esprit.
De là se dégage un profil évident : déjà une formation RH semble être une base nécessaire afin de circonscrire le champ des possibles en termes d’interventions. A cela s’ajoute une empathie naturelle et une aptitude au dialogue afin de discerner dans les équipes les besoins et parvenir à les exprimer.
Ensuite une bonne dose de créativité sera nécessaire pour inventer les actions et mesures susceptibles d’améliorer le bien-être au travail des salariés. Enfin il faudra aussi disposer d’un talent de persuasion certain pour convaincre la direction du bien-fondé systématique des sus-dites actions.
Bien-être et productivité, une corrélation désormais évidente
Ce dernier point ne devrait toutefois pas être le plus difficile. Lorsqu’un CHO est installé en entreprise c’est la plupart du temps le fruit d’une réflexion mûrie à la lumière de constats évidents. Et si les objectifs d’un tel recrutement varient d’une structure à l’autre ils restent dans l’ensemble convergents.
Le premier d’entre eux reste la motivation et l’engagement des salariés. Un salarié qui s’engage volontairement dans son travail parce qu’il aime ce qu’il fait et qu’il est respecté au sein de son équipe deviendra vite un pilier sur lequel l’entreprise pourra s’appuyer.
On peut également parler de la fidélité : les entreprises ayant besoin de personnel qualifié ont besoin de retenir leurs talents et le bien-être au travail est un critère de plus en plus important de ce point de vue.
Citons enfin la visibilité : un employé heureux au travail devient souvent un ambassadeur de son entreprise sur les réseaux sociaux (employee advocacy), que ce soit activement par le relai du dynamisme de celle-ci ou plus passivement par le prisme de sa propre expertise.
Le smile-out est l’avenir de l’entreprise
Notre génération est celle qui a vu apparaître et théorisé successivement les syndromes du burn-out (épuisement professionnel chronique), du bore-out (l’ennui au travail) et celui du brown-out (manque de sens dans la mission professionnelle).
Ces termes anxiogènes peuvent refléter une réalité du monde du travail peu reluisante et une conception du management dépassée. Mais ils parlent aussi de l’intérêt que l’on porte désormais à ces pathologies, quand on les ignorait volontiers au cours des décennies précédentes.
Il est temps de répondre à ces affections professionnelles par un concept plus fort dont la médiatisation du Chief Happiness Officer est un symptôme positif, celui du smile-out, qui reconnaît le bien-être au travail comme l’atout premier de l’entreprise, et le socle de sa culture.